Période de remise en question oblige, aujourd’hui tout est prétexte à débat. Symbole vital de la démocratie, ce qui n’est pas débattu est vécu comme une confiscation de la pensée. Alors à l’heure du bureau partagé, des projets collaboratifs, du management bienveillant, l’espace de travail est-il devenu un espace de débat permanent ?

La salle de réunion a fait son temps, elle fut autrefois le lieu unique de la discussion en entreprise. Un espace sacralisé et confidentiel où l’on est convoqué, invité et où chacun a une place.

On pensait que l’arrivée des open-spaces dans les années 60 serait le symbole du travail collaboratif facilitant les discussions en entreprise. Mais il a tourné au cauchemar, accusé d'être un espace de contrôle des salariés et motivé par sa rentabilité : un espace ouvert est beaucoup moins gourmand en mètres carrés qu'un ensemble de bureaux cloisonnés. Les années 80, qui vouaient un culte à la communication et à la transparence entre collaborateurs, ont achevé de détourner cette belle idée en entassant les salariés sur d’immenses plateaux froids. On le croyait voué à faciliter l'échange et il est devenu paradoxalement un espace muet où chacun a eu peur d’être jugé, espionné ou simplement de déranger ses collègues. L’ouvrage « l’Open-space m’a tué » d’Alexandre des Isnards et de Thomas Zuber publié en 2008 dynamite le débat et celui d'Elisabeth Pélegrin-Genel publié en 2016 "Comment (se) sauver (de) l'Open-space"vient le modérer.

Libérer la parole en entreprise est une innovation sociale. Si elle a toujours existé dans les espaces de détente, elle semble enfin trouver des nouvelles formes au sein des espaces de bureaux.

Petit tour d’horizon sur différentes configurations spatiales :

1. En solitaire

Débattre avec soi-même ou presque. Espace ultra-connecté, l’E-Bulle conçue par la société Leet Design permet de s’isoler pour se concentrer ou échanger en toute discrétion avec des interlocuteurs connectés.

E-Bulle, conçue par Leet Design et dessinée par AG CAD.

2. Côte à côte

Conçu comme un espace dans l’espace qui permet à plusieurs salariés de s'isoler pour terminer un travail ou converser en toute confidentialité. Ensembles mais à l’abri des regards et du bruit. Une position égalitaire qui facilite un rapprochement naturel.

Ajouter un paragraphe ici.L’alcôve Sofa imaginé par les designers Ronan & Erwan Bouroullec pour Vitra

3. Face à face

Entre la petite salle de réunion et le salon, c'est un espace d’intimité qui reste ouvert. Un compromis efficace qui permet de créer des îlots de discussions. Un boudoir modernisé.

Canapé Hive. Neudoerfler

4. En réunion

Lieu du débat traditionnel, la salle de réunion s’inspire des aménagements des nouveaux espaces de coworking. Elle est donc partagée, devient un espace créatif ou connecté. Elle peut aussi être le symbole d’une salle ultra confidentielle où tout se décide sous forme d'une « deal room » plus sélective, imitant dans sa décoration les salons privés des grands hôtels.

Bureaux à partager

Table connectée

5. En assemblée

L’organisation de conférences est devenue une activité en soi pour de nombreuses entreprises, pour faire circuler l'information, former les salariés, s'ouvrir sur des interventions extérieures. Au lieu de louer des espaces, il est devenu plus rentable de l’intégrer dans les espaces de travail. Si l'amphithéâtre perdure, la salle de conférences change de nom et devient un Hub ou un Lab, elle se cherche également des configurations moins classiques pour permettre des échanges plus dynamiques entre orateur et public.

Hub de BPI France

Lab.Qkarchitecture

6. Virtuel

Espace immersif et collaboratif, la réalité virtuelle et augmentée créé de nouveaux lieux de débat où les distances sont abolies. Remplaçant les anciennes salles de visioconférence, ces espaces virtuels créent des nouvelles conversations où chacun s’exprime sous la forme d’un avatar.

Improov3 de MiddleVR

Les espaces de travail ont créé des nouveaux lieux de débats au sein de l’entreprise, plus nombreux, plus modulaires, plus conviviaux. Leur objectif est d’apporter de l’efficacité et du bien-être aux salariés. « La forme, c’est le fond qui remonte à la surface » écrivait Victor Hugo, on peut donc espérer que l’ancienne réunion qui s'éternisait, perçue comme une perte de temps et où aucune prise de décision n’était prise ne sera demain plus qu’un mauvais souvenir.

@HBedonRouanet